Au fil des siècles, le village de Montclar s’est déplacé quatre fois, ce qui lui donne aujourd’hui cette originalité d’être réparti en plusieurs lieux dont aucun, à lui seul, ne peut prétendre être le véritable Montclar.
Le premier village de ce nom,
Dont nous ne savons rien avant le 13e siècle, était situé sur le sommet appelé « le Château » (aujourd’hui « la Salette ») où l’on voit une chapelle et une tour avec une horloge, l’une et l’autre construites au 19e siècle.
De ce village il ne reste que des ruines ; il était entouré d’une enceinte fortifiée attestée au début du 15e siècle (1408). Il voisinait avec un domaine appartenant aux Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem (appelés par la suite Chevaliers de Malte) qui s’étendait du lac de Saint-Léger jusqu’au col appelé, à cause d’eux, le Col Saint-Jean. Ce domaine fondé à l’époque des premières croisades (12e siècle) s’est maintenu jusqu’à la Révolution. Il ne reste des Hospitaliers aujourd’hui que la chapelle de Saint-Léger, la chapelle du col Saint-Jean, un bâtiment en ruines qui était leur métairie, au dessus du col, et des toponymes ici ou là : « l’Hôpital », « la Commanderie ».
A la fin du moyen-âge,
Les habitants de ce village perché descendirent peu à peu, famille après famille, dans la vallée, créant un nouveau village au sud du site ancien, dans le quartier qu’ils appelaient « le Vallon » et qu’on appelle « La Chapelle » depuis le début du 18e siècle. C’est le deuxième Montclar, avec ses hameaux Les Allards, Sous la Roche, Les Chapeliers, Risolet, Saint-Léger, Saint-Jean, Les Piolles, Les Lamés, Villette.
La vie de la commune s’est déroulée pendant près de trois siècles dans ce nouveau village autour de l’église Saint-Pierre qui a fait office de paroisse jusqu’en 1645 quand, sur ordre de l’archevêque d’Embrun.
On a construit l’Eglise paroissiale Saint-Michel au Serre-Nazet,
Pour remplacer l’église du vieux village qui est tombée en ruines depuis la fin du 16e siècle. Bien qu’elle soit la paroisse en titre, cette nouvelle église est restée longtemps isolée dans son quartier : le cœur de la commune demeure à La Chapelle jusqu’au milieu du 19e siècle. En 1820 encore, il n’y a qu’une maison au Serre-Nauzet en plus de la maison du curé.
A tel point que quand il s’agira de construire la maison commune à la fin du 18e siècle, il y aura débat entre les habitants : à La Chapelle ou au Serre-Nauzet ? Finalement elle est construite au Serre-Nauzet qui devient désormais le chef-lieu de la commune. Plusieurs familles s’y installent : c’est la naissance d’un nouveau village, le troisième Montclar.
Mais il n’aura pas le temps de se développer vraiment :
La vieille route qui le traverse (autrefois chemin royal) est déclassée en 1877/1878 au profit d’une nouvelle route créée vers 1860 (actuelle D 900) qui passe sur le versant d’en face, près de La Chapelle. Et surtout, à partir des années 1965/1970, la réalisation d’un projet touristique autour du col Saint-Jean par la création d’un village de vacances et d’une station de sports d’hiver marque la naissance et le développement d’un quatrième Montclar, consacrés en 1995 par la construction du bâtiment communal (école, crèche, accueil station et salle polyvalente), en 1997 le déplacement officiel de l’activité administrative de la mairie et en 2007 l’installation du bureau de vote. Le conseil municipal a pris l’habitude de se réunir là. Que reste-t-il au Serre-Nauzet ? Le titre de mairie du chef-lieu, mais c’est une coquille vide.
Un village frontière
Jusqu’au début du 18e siècle, Montclar et Saint-Vincent-les-Forts, sont proches de la frontière entre la Provence et le Piémont : cela leur vaut, pendant plus de trois siècles, de fréquents passages de troupes au cours des conflits nés, d’une part, des prétentions des comtes de Provence puis des rois de France sur le royaume de Naples ou le duché de Milan, d’autre part, des guerres de Louis XIII et Louis XIV contre le Saint Empire avec des campagnes contre le duc de Savoie dont les terres viennent jusqu’au Col Bas et au Lauzet . A partir de la signature du traité d’Utrecht (1713) qui rend la vallée de l’Ubaye à la France, la frontière est reportée sur le col de Larche.
A la différence de Seyne et Saint-Vincent avec leurs fortifications, Montclar n’a pas gardé de traces militaires de son passé. La batterie du Col Bas, construite de 1884 à 1886, à cheval sur les communes de Montclar, le Lauzet et Saint-Vincent, occupe une position stratégique à 2.500 m. d’altitude qui a permis l’installation d’un poste relais optique entre les fortifications des montagnes de la frontière italienne et les forts du Mont Faron dominant Toulon. Elle n’a plus d’utilité militaire aujourd’hui mais elle reste un point de vue exceptionnel sur la Provence et le Dauphiné.
PAR ALAIN BOUYALA